Description
Le rôle « essentiel » de l’Art Urbain
L’art est-il indispensable à la société? ». Ce sujet typique de bac de philo a pris une toute autre dimension avec la crise sanitaire, quand il s’agissait de distinguer ce qui était « essentiel » de ce qui ne l’était pas. Cela a permis de réaffirmer à quel point nous avions un besoin vital de culture, musiques, lectures, spectacles…, de tout ce qui provoque en nous de l’émotion. Et c’est bien ce qu’apportent les fresques qui fleurissent sur les murs. Transformer des parois grises et tristes en support d’œuvres d’art, redonner vie, même temporairement, à des lieux délabrés, exploiter des espaces inutiles comme les piles de pont, les murs bordant les voies ferrés ou les palissades de chantiers, c’est changer le regard des passants et rendre l’art plus accessible à tous.
Face à ce rôle social, bien des débats qui agitent le petit monde de l’Art Urbain semblent moins fondés. La perte de l’esprit « vandale » face à la multiplication des commandes ? Michel-Ange a bien été payé pour peindre le plafond de la Chapelle Sixtine, ce qui ne nous empêche pas de nous extasier devant ce chef-d’œuvre. La multiplicité des projets et le côté « furieusement tendance » des fresques urbaines ? Le reflet de la puissance et de l’inventivité d’un mouvement artistique sans précédent, dans l’intensité, l’universalité – tous les pays sont concernés – et la durée – plus d’un demi-siècle et ce n’est heureusement pas fini. Le passage du mur à la toile et de la rue à l’atelier ? Au-delà de la nécessité pour un artiste de gagner sa vie, c’est au contraire un aller-retour qui nourrit l’expérimentation et la créativité.
L’Art Urbain permet d’explorer un champ pratiquement illimité de sujets (même le Nu !), de formats (du tout petit au gigantesque), de supports (le mur, la toile, le papier mais aussi les planches de skateboard, le mobilier urbain, les matériaux de récupération…), de techniques (peinture, collage, pochoir, photographie… et même numérique), de styles et d’inspirations. Comme le dit Jonas Ramuz, fondateur de Quai 36, producteur de nombreux projets ambitieux, dont les fresques du Magasin Libre à Reims, « Le rôle des artistes d’Art Urbain, c’est de revenir à l’essentiel : le contact avec l’autre ». Essentiel, c’est dit !
Frédéric BENOIT
Directeur de la Rédaction
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